N°9 - 2002
Sommaire
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USA et «guerre préventive»
- Lubrifier la machine de guerre
(C.-A. Udry) 
                                         

Irak
- 1991-2002: de l'endiguement à la guerre
(entretien avec Raid Fahmi) 
            

Afghanistan
- Karzaï & Co et la reconstruction
(Marc W. Herold)     
                      

Emploi salarié des femmes
- Fabriquer les inégalités
(J.-F. Marquis)
                                   

Suisse - AVS/LPP
- Pour des pensions populaires
(B. Bovay)
                                         

Suisse - Assurance maladie
- De la santé publique aux soins privés
(S. Peters)
                                           

Suisse - GRE
- La «mentalité-casco» du patronats exportateur
(D. Lopreno)


Socialisme en débat
- «Qu’est-ce que le socialisme-à-partir-d’en-bas ?»V
(Hal Draper)

A lire
-
¡Que se vayan todos ! Le peuple d’Argentine se soulève
( François Chesnais et Jean-Philippe Divès
)


Les mots et la proie

Le 7 septembre, Tony Blair, en visite à Camp David, auprès de son mentor George W. Bush, déclarait: «Nous n'avons pas la plus petite idée de ce qui s'est passé au cours des quatre dernières années [depuis le départ des inspecteurs de l'ONU de l'Irak]... si ce n'est que nous savons qu'existe une tentative de reconstruire de l'armement.» (Daily Mirror, 9 septembre 2002) En dix-sept jours, Tony Blair passe de cette méconnaissance reconnue à un rapport de dizaines de pages, censé contenir des «preuves irréfutables». Un exploit. La BBC le salue ainsi: «Il[Blair] est peut-être un avocat, mais il ne voudrait pas aller devant un tribunal avec ce dossier.»(BBC News, 24 septembre 2002) Y compris sur la TSR, dans le journal télévisé de haute tenue - l'incomparable 19:30 - Christophe Carle, responsable de l'UNIDIR (United Nations Institute for Disarmament Research), doit reconnaître que le rapport de Blair ne contient rien de nouveau.

Et, pourrait-on ajouter, il ne comporte même pas un élément sur ce qui devait faire son originalité, selon les «informations» diffusées depuis dix jours: les liens entre l'Irak et Al-Qaida.

Tous ceux qui disposent de quelques connaissances historiques retrouveront dans ce tapage le célèbre «bourrage de crâne» qui accompagne tous les préparatifs de guerre. Les qualificatifs infligés au régime de Saddam Hussein sont le plus souvent exacts. Il s'agit d'une dictature. Cela ne date pas d'aujourd'hui. Sa brutalité était à son apogée lorsqu'il lança sa guerre contre l'Iran, au début des années 1980. Il reçut, alors, bénédictions et aides en tous genres des monarchies du Golfe et des puissances impérialistes. Les industriels suisses, avec l'acquiescement du Conseil fédéral, faisaient montre de déférence pour les acheteurs des sociétés d'Etat irakiennes, sources de rente pour le régime de Saddam Hussein.

La même hypocrisie régnait à l'occasion du discours de Bush devant l'ONU, que ce soit pour ce qui a trait aux «droits de l'homme» ou à «l'application des résolutions de l'ONU». Timor-Est a obtenu son indépendance en 1999, après vingt-quatre ans d'occupation par un régime soutenu par les Etats-Unis, malgré les résolutions de l'ONU. Les résolutions 446 et 465 du Conseil de sécurité de l'ONU exigeant qu'Israël retire les colonies juives des territoires palestiniens occupés sont oubliées. Cette question est renvoyée par les Etats-Unis à une «négociation entre Israël et l'autorité palestinienne»... qui est étranglée.

Dès lors, aucun des qualificatifs appliqués au régime de Saddam Hussein ou à sa politique ne peut camoufler que la guerre qui vient n'a rien à voir avec une «menace pour les Etats-Unis» et a tout à voir avec la volonté d'accroître et de consolider leur emprise sur une région stratégique du monde.

Il y a une cohérence: - entre la volonté affichée de «changer de régime» et le bricolage d'une coalition aux ordres de l'administration Bush et des pétroliers, une coalition similaire à ces gouvernements mis en place, en Irak, par l'impérialisme britannique; - entre les assurances données aux militaires de Turquie sur le maintien de l'unité territoriale de l'Irak (donc la non-indépendance des Kurdes) et le soutien accordé par Washington à Ankara qui réprime le peuple kurde; - entre l'utilisation, déjà maintenant, des troupes turques pour occuper, début août, l'aéroport de Bamerni (à quelque 80 km de Mossoul, capitale pétrolière) dans le Nord de l'Irak et la collaboration avec l'armée turque, pilier de la stabilité dans une Turquie en crise (appuyée aussi par l'Allemagne); - entre la conduite de guerres telles celles menées en Afghanistan ou en Irak et l'exigence que les soldats américains échappent à toute cour de justice internationale ;- entre l'appui à l'Etat d'Israël qui écrase le peuple palestinien et le refus de tout processus effectif d'autodétermination du peuple irakien (ce qui a été confirmé en 1991 lors des soulèvements au Sud et au Nord de l'Irak).

Cette guerre ne peut être séparée de celles menées par les Etats-Unis, sous diverses formes, au Nicaragua, à Panama, à Grenade, en Somalie, au Liban... ou dans l'ex-Yougoslavie. En Serbie, l'essentiel de l'armée de celui qui était appelé Hitler-Milosevic est resté en place. En Irak, la stratégie militaire des Etats-Unis est similaire: viser la tête du régime, pour s'assurer la collaboration de ceux qui ont mâté un peuple, et céderont les richesses pétrolières.

Le mouvement le plus large contre cette guerre impérialiste doit donc aussi épauler les forces qui luttent pour les droits sociaux et démocratiques en Irak. - cau

 

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